writer's bench

Dunkerque: E. Leclerc appelle à la délation

Dunkerque - appel à la delation - 511

Dunkerque, dans le Nord de la France. Par ces temps de crise généralisée, une grande surface tente de transformer ses clients en délateurs zélés. 1000 € en bons d'achats pour interpeler les auteurs de quelques malheureux graffitis, telle est l'honteuse carotte agitée par le patron du supermarché… Emmanuel Magdelaine s'y est rendu pour France3 Nord Pas-de-Calais.

C'est un appel à la délation, lancé par un supermarché Leclerc à Dunkerque. Pour retrouver les auteurs de tags (5 fois en 4 mois) qui salissent son bâtiment, le directeur a décidé d'offrir 1000 € de récompense à toute personne permettant de les identifier.

RAS LE BOL DES INCIVILITÉS : le titre de l'affiche à l'entrée du magasin était très clair. On y lisait ensuite :

« Le centre E-Leclerc de Rosendael offre une récompense (1000€ en bons d'achats) attribuée après vérification exacte de l'information à toute personne nous donnant, de façon rapide, certaine et précise de l'identité de l'auteur de ces dégradations. »

Une initiative prise à la suite d'une série de tags qui ont provoqué un ras-le-bol du directeur de la grande surface. Les deux tagueurs ont été vus sur les caméras de surveillance mais ils agissent de nuit et malgré leur signature -Osmoz-, impossible de les identifier.

« A chaque fois, j'en ai pour 2 à 3000€ de peinture pour recouvrir les soixante mètres de mur, Je veux que ça cesse. Il y a trois ans, j'ai investi 3,5 millions d'euros pour offrir un beau magasin. Ce n'est pas pour le voir se dégrader à cause d'incivilités. Je sais que les policiers font une enquête, des rondes la nuit, mais il faut que ça avance. c'est la première fois que je fais ça. en arriver là, c'est navrant. »

explique Jérôme Contard dans La Voix du Nord.

Machine arrière ?

Le procédé est en effet peu courant et a fait beaucoup réagir depuis hier jeudi. A tel point que le directeur de Leclerc Rosendael a décidé de faire un peu machine arrière.

Joint au téléphone ce vendredi, il nous dit qu'il ne regrettait pas son initiative mais a décidé de la rendre discrète :

« Mon métier, c'est de faire du commerce. Mais ça a pris trop d'ampleur. Alors j'ai décidé d'arrêter d'en parler. »

Les affiches qui avaient été placardées à l'entrée du magasin ont été retirées. mais la récompense de 1000€ en bons d'achat est maintenue. Pour l'instant, aucun délateur ne s'est manifesté.

writer's bench

Paris: bienvenue au Vandal Squad

bienvenue-au-vandal-squad-511

La brigade anti-tags, anciennement basée à la Gare du Nord de Paris, communique largement dans les médias français depuis l'arrestation des NBK. Émilienne Falto vient de s'entretenir avec eux.

Outre quelques affirmations plutôt curieuses – notamment que le milieu du graffiti vandale serait très dangereux et que les agents de la brigade craignent les représailles de certains – on y apprend aussi que le Vandal Squad travaille sur une nouvelle base de donnée globale censée faire le lien entre les tags et leurs auteurs. Lorsqu'on sait qu'en 2008, la CNIL (Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés) avait recensé un taux généralisé de 83% d'erreurs dans les fichiers policiers, il n'y a plus qu'à croiser les doigts pour que le travail de fichage systématique commencé par la brigade soit moins truffé d'erreurs que le fichier de police STIC par exemple. Voici l'article publié par le Blog Le Monde.

Bienvenue au vandal squad - 1- 511

Ils sont capables de dire si un tag a été réalisé de la main gauche ou de la main droite. Simplement en l'observant. Au fil des heures passées à compulser des livres et à consulter des forums, ils sont devenus experts en graffiti. Leur bureau ressemble à l'atelier du parfait petit tagueur. Les bombes de peintures s'étalent sur les étagères, des graffiti sont exposés au mur. Mais attention. Ici, on ne tague pas. On poursuit les graffeurs. Bienvenue à la brigade anti-tag.

Ce groupe travaille à la répression du graffiti dans le métro et sur les voies ferrées, dans toute l'Île-de-France. On y dénombre environ 300 graffeurs. Les préjudices pour la SNCF et la RATP atteignent 3 millions d'euros chaque année. Quant aux tagueurs, ils risquent jusqu'à sept ans de prison, et 100 000 euros d'amende.

Ils sont cinq. Cinq fonctionnaires de police passionnés de graffiti – graffiti vandale précisent-ils en permanence, redoutant d'être pris pour des chasseurs d'artistes. Cinq fonctionnaires qui ne comptent pas les heures passées à cette tâche. Y compris en dehors du temps de travail.

Quasiment de la graphologie

Bienvenue au vandal squad - 2- 511

« Il y a beaucoup d'investissement personnel »

admet le chef de groupe. Ses lunettes rectangulaires, très strictes, tranchent sur son gilet à capuche avachi. Comme ses hommes, il tient à rester anonyme.

« Peur des représailles, je n'ai pas envie de me faire taguer la porte de mon appartement tous les jours »

s'emporte son collègue, barbe noire et pull vermillon.

« Et puis, c'est un milieu dangereux, on doit penser à notre famille. »

Une seule personne accepte de donner son nom : Emmanuelle Oster, commissaire de police à la brigade des réseaux ferrés, dont dépend la brigade. Son nom a déjà été tagué sur des rames de métro. Qu'importe, elle ne mâche pas ses mots quand il s'agit des graffeurs considérés comme vandales.

« Les tags abîment les systèmes de fermeture des portes et les vitres du métro. Et ils génèrent un sentiment d'insécurité. Vous vous sentez en sécurité dans un métro tagué, vous ? »

Pour lutter contre ces graffeurs, le groupe anti-tag travaille main dans la main avec la SNCF et la RATP. Quand de nouveaux graffiti sont relevés dans le métro, la RATP remet aux policiers un devis accompagné de photos des tags. En particulier des blazes, les pseudonymes, sortes de signatures que les graffeurs laissent derrière eux. La brigade travaille à partir de leur analyse.

Bienvenue au vandal squad - 03- 511

C'est quasiment de la graphologie explique le chef de groupe. Les membres de la brigade travaillent à rattacher à chaque tagueur le blaze qui lui correspond. Le ou les blazes, car certains en ont plusieurs. Pour cela, il leur est arrivé une ou deux fois de faire appel à un graphologue. Mais la plupart du temps, ils se débrouillent seuls.

« Et on obtient des résultats. Actuellement, nous élaborons un fichier en cours de déclaration auprès de la CNIL, rattachant chaque signature à une personne. »

souligne Emmanuelle Oster.

Leur but ? Parvenir à imputer au tagueur la totalité de ses tags, c'est à dire, de ses dégradations. Une méthode qui porte ses fruits : en Octobre 2012, le préjudice imputé à une bande de graffeurs atteignait 700 000 euros.

« Mais c'est aussi beaucoup de boulot de flic »

précisent-ils. L'analyse des graffiti n'est qu'un point de départ à des investigations policières classiques.

« On n'est que des flics, pas des experts en art »

résume Emmanuelle Oster.

Comme des trophées

« Les gars de la brigade ? Ils aiment le graff autant que nous ! »

Rober ne révèle que son blaze, 18 ans, a longtemps fait partie des tagueurs du métro. Jusqu'à sa convocation par la police, il y a deux ans. Il s'en est tiré sans histoire, mais il a immédiatement arrêté. Le groupe anti-tag, il s'en souvient.

« Dans le genre cow-boy, ils sont numéro un. Dans leur bureau, il y a les photos des grands graffeurs attrapés, comme des trophées. »

Ces photographies s'étalent sur l'un des murs de la brigade. Contrastant avec le reste de la pièce. Comme pour rappeler qu'on est bien à la Police. Ambiance tableau de chasse. De face, de profil, de trois-quarts, les visages se suivent. Barrés de rouge. Sous chaque cliché, un mot. Smape. Morka. Tisko. Cli. Les blazes des graffeurs qui sont passés entre ces murs.

La pièce est duale. Entre passion et répression.

« Ils nous pourchassent tout le temps. Malgré tout, quand ils t'arrêtent, ils ont du respect pour toi. Ils connaissent ton travail. On est un tout petit milieu. Qu'ils le veuillent ou non, ils en font partie. »

explique Rober.

Respect ? Les membres de la brigade ne vont pas jusque là. Mais ils reconnaissent que lors des auditions, on échange, on discute du milieu.

« Après tout, nous sommes leurs seuls interlocuteurs »

observe le chef du groupe.

« Se faire arrêter par la brigade, c'est comme une médaille. Tu es allé à GDN, Gare du Nord, et tu en es ressorti. »

explique Rober.

Les locaux de la brigade étaient situés Gare du Nord jusqu'en 2011. Depuis, ils ont déménagé, mais le surnom est resté.

Bienvenue au vandal squad - 4 - 511

Lire la suite

writer's bench

NBK Vs. BRF

Ce jeudi 25 Octobre 2012, nouvelle opération de comm' pour les 5 membres de la brigade anti-graffiti dirigée par Emmanuelle Oster, la BRF (Brigade des Réseaux Ferrés) : interview dans le Parisien ou sur M6, et annonce avec fracas du démantèlement d'un « gang de dangereux anarchistes appelant au meurtre de policiers » (sic)… de biens grands mots pour annoncer le dernier coup de filet en date du vandal squad donc, celui des NBK (Natural Born Killers) / FTW (Fuck The World).

Anarchie, cocaïne, meurtre de policier, gang, acide, nul doute que le vocabulaire effrayant utilisé n'aura pas manqué de faire mouche auprès des juges, qui ont d'ailleurs également inculpé le groupe pour association de malfaiteurs. Rappelons tout de même que suite à la décision pénale rendue par le tribunal dans l'affaire du procès de Versailles, les graffs à la peinture sur des trains sont considérés comme des dommages légers n'entrainant pas la détérioration du support, donc punissables de TIG uniquement. Ce n'est cependant pas le cas de l'acide.

Voici l'article du Parisien :

Puis celui d'Europe 1 :

Le préjudice matériel est estimé à plus de 700.000 euros. Un groupe de tagueurs présumés de métro a été interpellé mardi, en région parisienne. Les six hommes arrêtés sont suspectés d'avoir réalisé des tags et des graffitis à l'aide de bombes de peinture ou d'acide sur les rames du métro et les trains du RER. Ils devraient être déférés jeudi devant le tribunal de Paris, rapporte Le Parisien.

Les enquêteurs ont travaillé plusieurs mois sur l'identification de ce groupe de tagueurs, connu sous le nom de NBK, en référence à un film d'Oliver Stone, Native born killers, « Tueurs nés » en français. Les six hommes étaient par ailleurs rattachés au groupe de tagueurs européen Fuck The World. Un groupe présenté comme appartenant à la mouvance anarchiste.

Les suspects, âgés de 25 à 28 ans, étaient particulièrement bien organisés. Ils avaient en effet une parfaite connaissance des réseaux ferrés parisien et francilien et se préparaient de façon quasi militaire pour leurs opérations. Sur leurs tags sont inscrites fréquemment des inscriptions menaçant la police. Certains suspects étaient déjà connus pour des faits similaires. Au total, 320 actes de vandalisme, touchant des dizaines de rames de trains, ont été recensés par les enquêteurs.

Des bombes de peintures, des masques, des bidons d'acide et de l'outillage appartenant vraisemblablement à la RATP ont été retrouvés par les enquêteurs de la Sous-direction régionale de la police des transports, lors d'une perquisition. Les policiers ont également retrouvé de la drogue en faible quantité : cannabis, cocaïne, champignon.

« C'est une équipe majeure de tagueurs qui mettait au défi la police qui a été démantelée. Le préjudice subi par la RATP et la SNCF est estimé à 700.000 euros. De nombreux document photos et vidéos trouvés en leur possession vont faire l'addition », commente un haut fonctionnaire, interrogé par Le Parisien.

« C'est aussi la première fois que le chef d'association de malfaiteurs est retenu contre ce type de délinquants », poursuit cette même source. Les tagueurs sont également suspectés de dégradation de biens publics et menaces sur personne dépositaire de l'autorité publique.

Les commentaires fantaisistes de l'info radio passée sur RTL sous le délicieux titre « La bande d'anarchistes n'hésitait pas à menacer de mort les policiers » viennent clore le bal – à écouter en streaming ici, ou à télécharger en MP3.

Heureusement, certains journalistes aiment gratter un peu et chercher plus loin que les communiqués officiels. Voici l'article publié sur Rue89 :

Lire la suite

writer's bench

Vandalisme, un mal français!

Du graffiti au vol de Vélib', il n'y a qu'un pas que France-Soir n'hésite pas à franchir allègrement pour en faire ses choux gras en couverture du journal d'aujourd'hui… Voici l'article écrit par Juliette Demey.

Vandalisme – Un mal français qui coûte plus de 5 milliards d'euros par an !

La comparaison n'est pas anecdotique. A elle seule, elle a valeur de symbole : à Londres, en un mois, seuls 3 vélos en libre-service ont été volés, alors qu'à Paris, pendant la même période… 500 Vélib' ont été dérobés.

Visiblement, les Français n'ont pas la même notion du bien public que les Anglais. Ce qui fait dire au maire de Londres, Boris Johnson, que nous sommes des « chapardeurs », alors que ses concitoyens ont le « respect pour les propriétés publiques ». Alors, la France serait-elle championne de l'incivilité et du vandalisme ? La question se pose, au regard de la litanie de ces actes de vandalisme, anodins ou graves, si quotidiens qu'on ne les relève plus. Des sièges lacérés dans les transports en commun, des Abribus déglingués, des voitures incendiées, des cages d'escaliers saccagées, des salles de classe abîmées, des espaces publics détériorés… Sans parler des vélos en libre-service désossés ou volés ! Autant d'actes qui coûtent très cher à la collectivité, et qui pourraient être investis plus utilement : les seuls actes de vandalisme dans les transports coûtent l'équivalent de 4.400 emplois. Deux économistes, Yann Algan et Pierre Cahuc, ont théorisé les causes de ce mal hexagonal dans un essai à succès (*).

La perte des valeurs morales

Ils y établissent un lien entre le manque de civisme des Français et la faiblesse du niveau de confiance mutuel : « Ici plus qu'ailleurs, on se méfie de ses concitoyens, des pouvoirs publics et du marché. Cette défiance allant de pair avec un incivisme plus fréquent… Or la défiance et l'incivisme, loin d'être des traits culturels immuables, sont alimentés par le corporatisme et l'étatisme du modèle social français », écrivent-ils. Parmi les causes des incivilités, d'autres avancent l'absence d'éducation civique, la crise économique, la perte des valeurs morales, le manque de perspective d'avenir, le jeune âge de leurs auteurs… Pourtant le vandalisme n'est pas toujours l'apanage des délinquants ! En 2009, une série d'incendies de voitures a mis en émoi le XVe arrondissement de Paris : « Après enquête, on s'est aperçu que le pyromane était une grand-mère qui n'avait plus toute sa tête », s'amuse une source policière. Peu d'études se sont penchées sur le coût de ce vandalisme pour la collectivité. Selon l'économiste Jacques Bichot, il s'élèverait à près de 5,6 milliards par an. De quoi jeter les bases du débat, en ces temps de rigueur budgétaire.

(*) La Société de défiance. Comment le modèle social français s'autodétruit, éd. Rue d'Ulm, 2007.

Source : France-Soir