Jusqu'à preuve du contraire, le graffiti sur les trains et métros est illégal dans la plupart des pays dans le monde. Mais y aurait-il deux poids deux mesures à l'encontre de leurs auteurs ?
En effet dans certaines métropoles européennes, les services de Police et de Sécurité chargés de « protéger » les trains des writers semblent se prendre au jeu, jusqu'à en devenir des tagueurs eux-mêmes en adoptant leurs codes et leurs pratiques.
Ainsi à Paris depuis quelques années déjà, différents services de police et de surveillance se sont attribués des noms de crew : certains signent CATZ ou taguent leur propre logo, un F comme Ferro (Police Ferroviaire). D'autres se contentent de tracer des croix, des traits ou des diagrammes au fat cap.
Leur spécialité : toyer, c'est à dire repasser tous les graffs qu'ils voient. Pour le vérifier, rien de plus simple : il suffit de regarder par la fenêtre lorsque vous empruntez un train de banlieue à Paris, et vous constaterez que la plupart des graffs peints le long des voies ont été customisés à leur insu !
Pourtant dans les nombreux procès qui opposent la SNCF aux tagueurs et graffeurs, la compagnie ferroviaire avance toujours son argument favori : prétendre que la peinture des bombes détruit ou endommage en profondeur le matériel roulant.
C'est bien entendu faux, et la justice française leur a déjà donné tort à plusieurs reprises, notamment en 2009 lors du délibéré pénal de la fameuse affaire du procès de Versailles, stipulant que les graffitis sur les trains ne résultaient pas d'un dommage grave mais d'un dommage léger uniquement punissable de petites amendes et de peines de TIG – mais la SNCF aime se cramponner à cet argument choc.
Le paradoxe est donc exquis, maintenant que l'on sait que leurs propres services, armés de bombes de peintures, s'amusent eux aussi à barbouiller les trains et murs des voies ferrées en France.
A Rome également, où le métro de la capitale italienne est une cible de choix pour les peintres, la sécurité des dépôts ne se contente plus de tracer des barres ou inscrire des insultes sur les graffs : les gardes se sont choisis des noms de tag, et un nom de crew pour le moins explicite : Security Service.
Depuis, les SS (wow !) s'en donnent à cœur joie sur les rames de la capitale italienne, allant même jusqu'à menacer de mort les graffeurs les plus actifs; ici, Ronny a dessiné un cercueil au nom de Poison sur un métro :
Doctor Verga, Ronny et Lulas furent les premiers à franchir le cap, et un petit nouveau, Cobra, fait désormais également parler de lui en taguant sur toutes les plus belles pièces en circulation sur les lignes du métro; ici, c'est le fameux whole car Caput Mundi qui en fait les frais :
Le comble : une tentative de graff Security Service, réalisé par des services de surveillance qui semblent avoir définitivement basculé du côté obscur de la force !
Dans ce monde à l'envers, pas question pour la police ou la sécurité de s'acheter leur propre peinture : les bombes sont directement « confisquées » aux graffeurs qu'ils attrapent, et le stock de « pièces à conviction » semble inépuisable !
Ignorant style, toyage, dépouille de bombes : le passé tumultueux des UV-TPK aurait-il fait des émules dans les rangs des forces de l'ordre ? Nous attendons avec impatience la prochaine étape, peut-être de beaux wild styles signés Police…
En attendant l'ironie de la situation n'a pas échappé aux writers, qui ne manquent pas de régulièrement lancer quelques clins d'œil comme ici sur cette rame du RER A ou sur ce train italien :
Retrouvez les œuvres de l' (in)sécurité romaine sur XXRoma, excellent blog consacré au graffiti sur le métro de Rome.
Source photo Catz : 90BPM