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Hotboy Hert

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Mass Appeal a récemment publié le témoignage de Ian Debeer alias Hert, un writer originaire de Buffalo, actif dans les rues de New York et de Pittsburgh. Spécialiste du street bombing, il a fait les frais de l'implacable justice américaine, ce qui l'a conduit à passer plusieurs années en prison. Son récit éclaire les rouages d'une politique répressive mise en place dans un pays qui fait passer la propriété privée avant tout, gare à ceux qui osent s'y attaquer.

« Le 7 Septembre 2010, j'ai été condamné à faire de 1 à 3 années de prison ferme, avec une période supplémentaire de probation spéciale de 5 ans devant être purgée consécutivement. En outre, je dois rembourser 50 000 $. Ma période de probation sera étendue jusqu'à la fin du remboursement. J'ai été retenu coupable de 69 délits et d'un crime commis à l'âge de 20 ans. J'avais 22 ans quand j'ai été envoyé en prison. J'ai actuellement 25 ans. Durant ces 3 dernières années, j'ai passé 1 an et 7 mois derrière les barreaux. J'ai passé 1 an en prison, 4 mois dans un centre de réhabilitation et 3 mois dans une prison du comté, j'ai passé tout le reste de mon temps sous le contrôle du Conseil de La Liberté Conditionnelle de New York. J'écris ce témoignage de chez ma mère. Dans le cadre de mon contrôle judiciaire, je dois vivre avec quelqu'un de ma famille. Je ne peux pas résider ailleurs que chez elle. Je dois être enfermé à la maison de 21h à 8h du matin. Je n'ai pas le droit de conduire, je n'ai pas le droit de posséder quoi que ce soit ayant un rapport au graffiti y compris du matériel artistique. La commission de libération conditionnelle a refusé que je choisisse mon lieu de résidence. Je suis donc condamné à rester dans la ville ou je suis né, tout simplement un endroit ou je n'ai pas envie d'être. »

« J'ai été très actif à Pittsburgh pendant environ 8 mois. J'ai finalement été arrêté pour 4 affaires liées au graffiti. Ca ne m'inquiétait pas plus que ça, je sortais systématiquement du poste le lendemain, ils ne m'avaient pas attrapé en train de peindre mon blaze. 3 mois plus tard le Vandal Squad a perquisitionné mon appartement. Heureusement, je n'étais pas inscrit sur le bail pour éviter ce genre de problèmes, mais j'ai appris que la police peut obliger une personne suspecte à établir sa résidence. La police ne m'a pas arrêté à l'époque, mais j'étais désormais bien conscient des problèmes auxquels j'allais être confronté. Atak m'a appelé et m'a suggéré de le rejoindre à New York. J'ai donc déménagé là-bas, je retournais 1 fois par mois à Pittsburgh pour les différents procès. Un an plus tard, j'ai été de nouveau arrêté et accusé de 69 délits. Ma caution a été fixée à 25 000 $. Grâce à de bons amis, j'ai réussi à verser la caution, juste à temps pour voir ma tête à la télévision, le soir-même au journal. Mon avocat de l'époque demandait 25 000 $ de plus pour continuer à me défendre. Je n'ai jamais été une personne riche, je n'en avais pas les moyens. J'ai rapidement trouvé un avocat qui a fait le boulot pour 10 000 $. J'ai passé une année à travailler à New York 7 jours sur 7 pour payer mes amendes et mes aller-retours à Pittsburgh. »

« Parmi les détenus qui ont partagé ma cellule, il y en avait un d'environ 40 ans, assez malin et pas très à l'aise en prison. Je me suis renseigné à l'extérieur pour en apprendre un peu plus. Cet homme a été agent de police pendant près de 13 ans. Une nuit, ivre au volant de sa voiture, il a tué un jeune homme. Il a pris la fuite et a seulement été arrêté 2 ans plus tard, le policier qui l'accompagnait cette nuit là ayant eu quelques petits problèmes de conscience. Il a été condamné à 1 à 2 ans de prison et libéré de manière anticipée. Il a dû verser 15 000 $ à la famille du jeune homme qu'il a tué. J'ai été condamné à une peine plus longue et plus couteuse que ce criminel… »

Le témoignage est à lire intégralement en anglais ici.

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Interview Zeon

Interview Zeon - 511

David L'Épée a rencontré Zéon, graffeur notamment connu pour ses fresques à thème particulièrement travaillées réalisées il y a quelques années sur le métro parisien.

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Il a depuis entamé une carrière de dessinateur caricaturiste, aux côtés des controversés Dieudonné et Alain Soral pour la réalisation de la bande-dessinée Yacht People.

Il évoque dans cette interview son passé de writer et les problèmes qu'il rencontre régulièrement pour ses prises de position tranchées, notamment à travers sa fresque dédiée à Hugo Chavez (président de la République du Venézuela décédé le 5 mars 2013), qui fût toyée à plusieurs reprises par des antifas.

Le mur en hommage à Chavez :

Le mur toyé :

L'interview :

Parmi ses détracteurs, la LICRA ((Ligue Internationale Contre le Racisme et l'Antisémitisme), qui lui intente un procès qui vient de se tenir ce 20 Septembre 2013 au Tribunal de Grande Instance de Paris, pour la caricature ci-dessous.

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Free Vamp!

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En Angleterre, le couperet est tombé pour Vamp. Il passera les 3 prochaines années à l'ombre. Condamné pour vandalisme, son cas a fait les choux gras de la presse locale qui se régale avec l'histoire d'un homme inséré dans la société, père de famille et passionné de graffiti. Romain André, du journal des étudiants de HEC Montréal, a récemment exposé son point de vue dans cet article :

Sentence exceptionnelle pour un vandale exceptionnel.

Kristian Holmes n'a pas la gueule du gangster et pourtant le bonhomme est traité par la presse britannique comme si cette face rondouillarde avait été celle de Pablo Escobar et la justice londonienne n'en fait pas moins en le condamnant à 3 ans et demi de prison ferme le 17 Juin dernier. Mais qu'a donc fait ce dangereux criminel pour cela ? Et bien celui qui a couté à l'État Britannique £250 000 est plus connu dans le milieu du graffiti sous le nom de Vamp. J'imagine votre stupéfaction en lisant ces lignes ; oui on peut être condamné si lourdement pour du vandalisme. Là où l'affaire interpelle l'Angleterre est que M. Holmes, employé qualifié de normal par ses collègues, père de deux enfants et gagnant a 32 ans l'équivalent de 100 000$, chamboule l'image que le public se fait du graffeur vandale. Ceux qui s'imaginaient tous les matins et prenant le métro que les gamins du quartier étaient responsables du peinturlurage des voies, réalisent que leur morveux est trop peureux et trop peu expérimenté pour de tels actes.

Mais ce qui me choque particulièrement dans cette affaire ce n'est pas tant la manière dont Holmes est devenu un phénomène de foire (après tout nous avions connu un cas similaire lors de l'arrestation surmédiatisée de Revok en 2011) ; ou encore la sévérité de la condamnation qui, bien qu'exceptionnelle, nous rappelle le sens du terme tolérance zéro, leitmotiv de la politique anti-graffiti londonienne. De plus la sentence est pour ainsi dire à la hauteur de l'homme dont le blaze inspire le respect dans le milieu. Non, ce qui me met hors de moi ce sont les mots du procureur, relayés par la presse anglaise :

« Mr Holmes is a prolific graffiti vandal. We are not talking here about witty imaginative images such as those I expect you are familiar with by Banksy … I would suggest what you are dealing with is simple damage.

Mr Holmes est un vandale prolifique. Nous ne parlons pas ici de représentations imaginatives et pleines d'esprit dont nous sommes familiers avec Banksy… Je dirais plutôt que c'est de la dégradation. »

Est-il donc acceptable de peindre illégalement en Angleterre du moment que vous faites de jolies images qui plaisent aux bobos détenteurs du bon goût et que vous vous justifier par un pseudo engagement politique ? N'allez pas vous imaginer que je porte une quelconque haine contre Banksy, je respecte au contraire le travail du personnage, mais lui-même, dégouté de l'icône qu'il est devenu s'est senti obligé de s'excuser dans son film Exit Through the Gift Shop. Le travail qu'effectue Vamp nécessite au-delà de beaucoup de préparation et de sang-froid, une maîtrise de son sujet et de ses outils. Vamp n'a rien d'un toy ; terme utilisé dans le milieu pour désigner un adolescent boutonneux qui durant sa crise prend l'envie d'attraper une bombe de peinture. Il s'agit au contraire d'un artiste accompli, car tandis qu'Obey s'amuse à vendre des T-shirts à tous les hipsters qu'il croise, Kristian Holmes, déguisé en agent d'entretien, tapisse la ville de ses œuvres.

A présent méfiez-vous, peut-être que votre voisin, père de famille, bien sous tous rapports, attend en réalité que la nuit soit tombée pour redécorer les trains de votre ville avec son crew composé de votre boucher et du comptable dont vous vous moquez constamment au boulot.  Ayons pour terminer une pensée pour sa famille et clamons ensemble Free Vamp pour celui qui il y a seulement deux ans peignait des Free Revok dans les rues de Londres.

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Toulouse: Gendarmes Vs. Tagueurs

Toulouse Gendarmes Vs Tagueurs-511

On se demande où sont les priorités de la gendarmerie nationale à la lecture de cet article qui décrit une enquête impressionnante d'un sous-officier qui s'est mis en tête d'éradiquer le graffiti à Toulouse et sa banlieue. Dans cette affaire il ne s'agit ni de trains, ni de métros mais exclusivement de murs dont un, appartenant à une base militaire le long de l'autoroute, qui a mis le feu aux poudres.

Un gendarme de Cugnaux s'est lancé dans une traque des tagueurs depuis sept mois. Vingt et un suspects ont été identifiés et placés en garde à vue. Une liste pas encore close.

Gendarme de terrain, modeste, pas franchement à la recherche de notoriété. Pourtant, ce sous-officier est craint, même redouté dans le monde interlope et secret des tagueurs.

« Ils sont un peu surpris de ma connaissance du milieu. »

sourit l'enquêteur. Surpris et pas franchement heureux. Depuis avril, ce sous-officier a placé en garde à vue 21 tagueurs, âgés de 17 à 40 ans. Parmi eux des jeunes plutôt tournés dans le vandalisme et des artistes, l'un est même reconnu internationalement. Leur infraction ? Avoir pris les murs de Cugnaux et de la banlieue Ouest, notamment le mur de la base de Francazal, comme lieu d'expression.

Quelques murs de la base de Francazal :

« En fait tout a commencé dans la nuit du 10 au 11 Novembre. Les magasins Bricomarché et Intermarché de Cugnaux ont été tagués. Des graffitis. J'ai réalisé des constatations, classiques. »

se souvient le gendarme. Pris au jeu des investigations, le militaire se lance dans le sujet, commence à lire et à identifier les blazes, les signatures des tagueurs. Il fréquente les réseaux sociaux et monte patiemment son dossier.

« Quand on connaît, on peut facilement les suivre à la trace. »

glisse ce désormais spécialiste.

Et pour les artistes concernés, le réveil a été brutal ces dernières semaines. Habituellement, exceptées quelques arrestations en flagrant délit au cœur de la nuit, les investigations sur ce qui est un véritable fléau pour les municipalités – entre 1,5 et 2,5 millions d'euros de frais de nettoyage pour la ville de Toulouse chaque année – ne vont pas très loin. Le dossier tag de Cugnaux a déjà permis de confectionner 183 scellés (ordinateurs, téléphones, disques durs avec les mémoires des photos des tags réalisés par les suspects), de saisir 500 bombes de peintures (!) et 300 Posca, les feutres qu'utilisent les tagueurs. Et le parquet, bien décidé à renvoyer tous les suspects devant les tribunaux, attend la fin des investigations pour finaliser les poursuites. L'enquêteur reste discret mais il manque encore à son tableau de chasse quelques noms.

Déjà son enquête a eu un premier effet : il n'y a plus de tag à Cugnaux. Lors des auditions, les tagueurs ont compris le danger et les amendes et dommages et intérêts qui risquaient de tomber en justice. Et même sur le périphérique, l'enquêteur a constaté une baisse.

« C'est un monde assez clanique. Entre les anciens et les jeunes, ils ne se fréquentent pas trop. Mais ils considèrent comme leur liberté de taguer où ils le désirent. Après, ils respectent des codes comme ne pas recouvrir le tag d'un autre. Enfin normalement. j'ai compris que ce n'était pas toujours le cas. »

Plus de 100 000 m² de tags effacés en 2012

Il en va des affiches comme des tags sur les murs de Toulouse : ça adhère aux murs et ça coûte de l'argent à la collectivité. Selon les calculs, la facture annuelle du nettoyage des tags (qui inclut l'enlèvement des affiches) s'élèverait à Toulouse entre 1,5 et 2,5 millions d'euros. Le coût de l'équipe des 45 agents municipaux spécialement dédiés à la lutte anti-tag est estimé à 1,2 million d'euros par la mairie de Toulouse auquel il faut ajouter 250 000 € de frais d'intervention. Si l'on comptabilise l'achat et l'entretien de matériel, ce sont des centaines de milliers d'euros supplémentaires qui sont consacrés chaque année à la lutte contre les tags. L'année dernière, 98777m2 de tags ont été effacés à Toulouse et 3 141m2 dans l'agglomération. «Nous recevons effectivement de plus en plus d'appels, confirme Alexandre Marciel, élu en charge de la propreté à la ville de Toulouse et à la communauté urbaine. Nous intervenons essentiellement au centre-ville, sur des murs et des vitrines ou du mobilier urbain, mais aussi sur la rocade et dans les communes périphériques. Notre méthode est d'intervenir le plus rapidement possible pour dissuader les tagueurs de recommencer.» Des expériences sont aussi en cours avec des graffeurs, le service culturel de la ville de Toulouse et des entreprises (ERDF par exemple) pour décorer des friches industrielles ou des murs à proximité du périphérique.

Le chiffre : 21 arrestations

Commencé à l'automne, l'enquête s'est accélérée en avril avec les premières arrestations. Au total, 21 suspects, âgés de 17 à 40 ans ont été placés en garde à vue et devraient être jugés par le tribunal.

« Le nettoyage coûte de 20 à 50 € le mètre carré. Environ 2,5 millions par an pour la ville de Toulouse, 150 000 € simplement pour la rocade. »

Photos : Cugnaux Photos
Texte : La Dépêche

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Londres: Prison pour graffiti, l'escalade

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Cela fait un moment que la tolérance zéro est appliquée en Angleterre. Le graffiti est dans la ligne de mire de la justice qui n'hésite plus à prononcer des peines d'emprisonnement ferme à l'encontre des writers.

Parmi eux, Fista, Tox, Noir, Hoover, Zerx ou plus récemment Oker en ont déjà fait les frais et ont écopé de plusieurs mois, voire plusieurs années de prison. Cette fois, une nouvelle étape vient d'être franchie avec la condamnation de Vamp, un des writers les plus actifs de Londres, à 3 ans et demi de prison ferme.

Pourquoi se battre contre l'évasion fiscale et autres délits mineurs lorsqu'on lutte ainsi contre le vrai crime organisé ! Bien sûr la presse britannique applaudit des deux mains, avec comme d'habitude des titres ronflants pour pas grand chose : « £60,000-a-year surveyor who led secret life as leader of prolific graffiti gang which defaced hundreds of trains and buildings is jailed », se réjouit le Daily Mail, soit en français : « l'expert à 70 000€ par an, qui menait une double vie en tant que chef d'un gang prolifique ayant vandalisé des centaines de trains et de murs, est en prison »… Dormez tranquilles, citoyens !

Quelques murs de Vamp :

Quelques trains :

Source : The London Vandal