Lundi 3 Octobre, Hugo Vitrani a interviewé JR pour Mediapart dans son atelier avant son départ pour Shanghai où il expose son dernier projet avec la galerie Magda Danysz. Il vient également de remporter le TED Prize 2011. En attendant la sortie de son long-métrage Women are heroes au cinéma, retour sur son œuvre et sa démarche, sous forme d'abécédaire vidéo.
La photo d'un minaret de 40 mètres de haut collée en plein cœur de la Suisse ? Voici l'un des derniers faits d'arme de JR, cet artiste de 27 ans qui n'a rien du héros de Dallas. Artiste activiste, JR devient internationalement célèbre lorsqu'il se rend en 2005 au Proche-Orient pour aller photographier des Israéliens et des Palestiniens se faisant des grimaces. Il les colle ensuite par paire sur le mur de sécurité séparant les deux territoires. Le collage de la photo en très gros plan du rabbin, de l'imam et du curé hilares fera le tour du monde.
JR vise juste et cadre à la perfection, au 28mm. En pleine période de tension dans les banlieues françaises, il photographie les habitants de la cité des Bosquets pour ensuite coller ces portraits dans la rue. Illégales, certaines photos seront karcherisées, illustration presque parfaite de la désormais célèbre formule de Nicolas Sarkozy.
Grâce au collage de ces portraits sur les murs de la cité, les photos de JR se trouveront en toile de fond des émeutes de 2005. Et c'est en réaction au traitement médiatique des banlieues que JR retournera photographier les habitants en leur demandant de jouer leur propre caricature, pour les coller ensuite dans les quartiers chic de Paris. Ses clichés répondront ainsi aux clichés véhiculés sur Clichy (et les autres cités) . La réalisation de ce projet lui vaudra la Une du NY Times.
S'assumant comme artiste, JR refuse la commande et reste guidé par l'envie d'aller voir les choses par lui-même, en restant indépendant. Pour cela, il refuse tout mécénat, et autofinance ses projets par la vente de ses œuvres, vente qu'il contrôle d'une main de maître pour ne pas se «laisser happer par le marché et risquer de tout perdre en flambant». Il se distingue ainsi de Banksy, bien qu'ils partagent le même marchand (Lazarides) et un même goût pour l'anonymat.
L'anonymat de JR est un vestige de son passé de graffeur. Mais c'est aussi une garantie pour le bon déroulement de ces projets. Car JR est un globe-trotter, il passerait donc moins facilement les frontières si son identité était diffusée.
Avec Women are Heroes, son projet – dont il a fait un film – l'a conduit pendant trois ans dans une favela de Rio, dans des villages du Liberia, en Sierra Leone, au Cambodge ou en Inde. «En temps de paix, les femmes sont discriminées. En temps de guerre, elles sont des cibles.» JR montre et fait parler ces femmes tragiques qui passent des larmes aux rires sur les murs des villes, toujours à très grande échelle.
Car la taille est essentielle dans son travail: «Le gigantisme des installations redonne étrangement une place à ces individus qui existent soudain. (…) C'est dans cette façon de révéler – terme photographique s'il en est – des gens et la ville que la démarche fait sens» (Christian Caujolle).
Décidément, JR est un artiste du Tout-Monde. Son esthétique est une «esthétique du bouleversement et de l'intrusion» pour le dire avec les mots d'Edouard Glissant dans sa Poétique de la Relation.
Rencontre en vidéo :
JR de A à F :
JR de G à J :
JR de M à P :
JR de R à W :
Source : Mediapart
bien cool
du lourd !!