Après s'être consacré à la noble tâche d'orner de mille couleurs la ville rose, au sein des collectifs Truskool puis Le Club, Tilt est parti sur les routes avec en tête l'envie d'étancher une soif incommensurable de voyages, de rencontres, de graffitis, mais aussi de jolies filles… il faut le dire ! Une vie qui l'aura mené aux quatre coins du globe, une bombe, un marqueur, ou un skate à la main nourrissant l'obsession frénétique d'y apposer son emblématique throw up, seul ou accompagné de son fidèle acolyte Mist.
Mais comme tout traveler qui se respecte, il y a un moment où l'on a envie de se poser, et de mettre les choses au clair. En ce moment de passage à Paris pour sa prochaine exposition My Love letters, Jekyll&Hyde en a profité pour le rencontrer et lui poser quelques questions sur son parcours, sa vision, ses rencontres… et bien plus encore.
Salut Tilt, petite question récurrente pour commencer : quelle heure est-il, et où es-tu alors que tu réponds à notre interview ?
Je vais vous faire rêver, il est 13h51 et je suis a Toulouse…!
Peux-tu rapidement nous parler de ton parcours ?
Né à Toulouse en 1973, je commence le graffiti sur le petit banks de skate de ma cité et les garages en sous sol en 1988, avant de voyager autour du monde, États-Unis, Hong Kong, Japon, Mexique, Thaïlande, Australie, Nouvelle Zélande, Laos, Chine, Canada, Philippines, Taïwan, Indonésie, Maldives et plus de 12 pays d'Europe.
Puis je pars m'installer à New York pendant deux ans, un passage de quelques mois à Manille avant de retourner dans ma ville natale il y a 6 mois… I love Toulouse !
Tu as fais partie de l'époque « phare » du graffiti toulousain. Celle de la Truskool, des collaborations avec Fafi, Der, Tober, et toute la clique… Peux-tu nous décrire l'ambiance de l'époque, et qu'elle était la motivation de votre crew ?
C'était incroyable de vivre cette époque où la ville était overdosée de graffs, tags, flops, affiches, tickets. On peignait tout le temps avec des fausses autorisations ou même comme ça, au culot… Et ça passait ! J ai vécu de vrais moments de bonheur picturaux et tout ça sans parler des sessions nocturnes où on était de vrais boulimiques (chromes, flops et beaucoup de trains). Ce sont tous ces bon souvenirs, et la recherche de l'Histoire avec un grand H, qui me poussent encore aujourd'hui à continuer…
Qu'en est-il aujourd'hui ?
Je sors peindre plus souvent seul mais la ville est trop propre et mes vieux partners in crime sont devenus des papas…
Depuis tu as pas mal laissé traîner ta patte sur la peau de jeunes, et moins jeunes filles… De l'extérieur on pourrait croire à un délire ego-machisto-centrique, est-ce le cas ?
C'est un projet qui a beaucoup été médiatisé… Mais à mon grand regret je dirais mal médiatisé ! Il n'y a rien de ego-machisto-centrique, ça serait même le contraire. Un des principes du concept des Bubble Girls c'est de leur offrir un moment de liberté. Je ne force jamais rien dans ces chambres d'hôtel. Les filles timides ne se retrouvent pas face au photographe relou qui leurs demande de montrer un peu plus d'épaule. Et à contrario, la fille qui veut délirer sur un trip exhib, mais qui a peur de se faire juger par son mec, sait qu'elle peut le faire avec cet étranger qu'elle ne reverra jamais. D'où le côté naturel et léger qui se dégage des shoots…
Cedar Lewisohn, qui organise le show à la Tate Modern gallery de Londres, m'a dit une fois qu'il voyait mon travail des Bubble Girls comme une sorte de carnet de chasse. Mais après une longue discussion dans un pub allemand, il a totalement changé d'avis !
Comment choisis-tu tes participantes ?
Au hasard des rues, ce sont des rencontres magiques… Et la magie est quelque chose de rare de nos jours !
Tu sais que tu alimentes quand même pas mal les fantasmes sur de telles pièces… Alors, est-ce déjà allé plus loin que la simple collaboration artistique avec une Bubble Girl ?
Pour résumer, c'est arrivé avec ma Bubble Girl toulousaine Virginie et je suis avec elle depuis plus de 5 ans.
Laquelle de ces sessions body-street painting t'a le plus marquée ? Pourquoi ?
Une des dernières à New York où je me suis retrouvé avec une bombe latine qui répondait au doux nom d'Alexia et qui, après plus d'une heure à discuter des photos que nous allions faire ensemble, m'a avoué qu'elle était un garçon… Les photos sont superbes et son histoire tellement intense !
J'ai d'ailleurs eu des échos de ton expo solo à Paris, à la galerie Celal, qui a lieu ce mois d'octobre… comme quoi tu nous aurais concocté une petite surprise, à base d'installations et de Bubble Girl. Peux-tu nous en dire plus ?
C'est une surprise comme tu le dis.
Tu présenteras également une série d'oeuvres exclusives, qu'elle est la ligne directrice de l'expo ?
Après deux ans passés à New York, je me suis « presque » fait influencer par la culture américaine à mon insu. Ensuite, ça fait un moment que j'essaye de garder la lettre au centre de mon travail et depuis peu j ai trouvé une manière de faire de l'accumulation calligraphique figurative… disons donc que l'expo reflète ce « tout ».
De quelle pièce es-tu le plus fier ?
L'installation surprise !
Pourquoi avoir attendu aussi longtemps pour présenter ton travail en solo ?
Je l'ai déjà fait en Australie, Nouvelle Zélande ainsi qu'à Paris il y a un moment, mais cette fois-ci c'est différent ! Ça fait longtemps que je voulais montrer plus que mes photos et pour cela il fallait une grande galerie, de l'espace pour pouvoir montrer des peintures grands formats, réaliser des installations, des dessins, des vitraux, des sculptures…
Comment envisages-tu l'évolution de ta carrière d'ici 5, 10, 15 ans ?
J'essaye de pas y penser…. C'est un fantasme mais je voudrais vivre au jour le jour pour continuer à prendre le même plaisir qu'il y a 5, 10, 15 ans…
Mini Interview (question/réponse) spécial Old school / New school
Le morceau qui tournait en boucle dans ta Hifi à l'adolescence ?
Bruce Springsteen, Born in USA
La tête d'affiche de la dernière soirée où tu es sorti ?
Africa Bambaataa
L'âge de la première Bubble Girl que tu as peinte ?
24 ans
Celui de la dernière ?
24 ans
Lieu « d'élaboration » de ton premier flop ?
New York
Lieu « d'élaboration » de ta dernière oeuvre ?
Toulouse
La personne qui t'a versé ton premier cachet d'artiste ?
La MJC de ma cité de naissance.
Le dernier cachet que tu as perçu ?
Un vitrail vendu chez Speerstra en Suisse lors de notre expo avec Mist.
La première fois où l'on t'a dit « ahhh c'est toi Tilt !? »
Il y a bien longtemps dans une usine désaffectée de Toulouse, il s'appelait Joe…
La dernière fois où tu as reconnu quelqu'un ?
Kate Moss a l'aéroport de New York
Question bonus : Quelle question aurais-tu aimé que l'on te pose ? ( et sa réponse )
Peux-tu nous dire qui est-ce que tu admires ?
Ma grand-mère.
trés belle interview. Je suis Toulousain, graffeur et fan depuis mes débuts de Tilt et de la truskool en génèral. Ce sont eux qui avec d’autres all timer ( come Sike, Arone et Reso plus tard) on donnés leurs letres de noblesses à Toulouse à cette epoque.
Les rues, les voies ferrees et la rocade de Toulouse etait sur exploitait et c’etait une belle epoque pour commencer. Pour ce qui est de mon petit travaille de graffeur Tilt m’a donné envi de couleurs
de terrains abandonnés et repetition d’un lettrage simple et bubble compris par tous et exitant à repeter. Son flop est légendaire et son travail l’est déjà et le sera encore longtemps.
Vivement le vernissage de l’expo il me tarde de voir ca.
Bonne continuation à lui et à Jekyll and Hyde
Thierry